L’artiste-entrepreneur : d’auto-produire un disque à auto-produire son projet musical

Depuis une bonne décennie déjà, les acteurs de la musique constatent que l’autoproduction occupe une place de plus en plus importante sur le marché de la musique. Les moyens d’enregistrement se démocratisant toujours plus et étant maintenant à la portée de tout passionné muni d’un ordinateur, le nombre de petits projets à défendre explose et tous ne trouvent pas de labels réceptifs et décidés à les soutenir. Mais ce n’est pas par dépit que tous les musiciens auto-produits se tournent vers l’autoproduction : on remarque à l’autre extrémité du monde musical que cette stratégie est aussi adoptée par des artistes d’envergure jouissant d’une reconnaissance qui leur ouvrirait logiquement les portes de “majors”, ces grosses machines qui ont des moyens colossaux à investir. Ces artistes décident de baser intégralement la structuration de leur carrière sur ce statut d’artiste-entrepreneur. Les artistes non signés par des labels constituaient d’ailleurs au niveau mondial en 2018 la part du marché musical la plus dynamique, avec une accroissement de 27% des revenus générés par rapport à 2017 (étude MIDiA Research reprise par l’Irma).

Les apports du numérique

Les artistes-entrepreneurs peuvent compter sur plusieurs leviers pour faire fructifier leur travail sans l’aide d’un label, à toutes les étapes : du crowdfunding (financement participatif), au moment de la production de l’album, aux réseaux sociaux, blogs,.., pour en faire la promo, jusqu’aux solutions apportées par les plateformes en ligne pour distribuer eux-mêmes leur œuvre (les plateformes Bandcamp, Soundcloud, Spotify, ou les agrégateurs dédiés aux artistes non signés par des labels Tunecore et iMusicians par exemple), l’artiste peut gérer de manière plus ou moins indépendantes toutes les étapes d’existence de son projet – en tout cas sans qu’un label vienne ponctionner un peu plus le peu de revenus qu’il arrive à tirer de son travail, notamment sur le web.

Le disque n’est plus le but principal d’un artiste

Ne plus être tributaire d’un label permet une plus grande flexibilité, et le projet global de l’artiste sort de plus en plus du cycle classique album-tournée-album-tournée. Le marché du disque étant dans l’état que l’on connaît, et l’idée même d’un album comme d’une entité à part entière se perdant quelque peu, sortir un disque n’est plus nécessairement le but ultime d’un artiste. L’image prenant tout d’abord une dimension majeure dans le projet, avec la prépondérance de Youtube et l’importance de proposer des clips : l’artiste peut être amené à lancer une campagne de financement participatif pour produire des titres accompagnés de clips, sans forcément viser la production d’un album en définitive. Et si album il y a, il est de plus en plus commun de voir les artistes signer directement des accords avec les distributeurs et de gérer leur promo.

D’une manière générale, se passer d’une signature avec un label offre une plus grande liberté dans la définition de son projet et son développement. Mais, en parallèle, c’est aussi une charge de travail supplémentaire pour les artistes, qui doivent passer du temps à gérer leur projet, et leurs relations avec un nombre d’acteurs bien plus important. D’où le développement des managers d’artistes-entrepreneurs, qui ne servent plus uniquement à trouver des dates de concerts mais de conseiller et d’aide au développement, à la défense des intérêts de l’artiste (face à Youtube ou Because Music, filière d’Universal, on le comprend !) et à la structuration de carrière.

Des profils différents

Plusieurs tendances sont aussi à distinguer parmi la masse d’artistes-entrepreneurs, entre artistes à l’esprit DIY, qui apprennent sur le tas et rechignent rarement à signer avec des labels indépendants si l’occasion se présente, et toute une frange des artistes actuels également soucieux d’échapper à la main-mise des labels traditionnels, et issus des cultures urbaines particulièrement, qui conçoivent et montent leur projet comme une entreprise. On citera par exemple le nom d’Antoine Guéna, du collectif 1995, jonglant parfaitement entre sa casquette de MC et celle de businessman. La maîtrise de l’image de marque du projet est donc intégrée par les artistes eux-mêmes, les artistes-entrepreneurs hip-hop et rap mettant souvent à profit de manière très habile des partenariats avec des marques et des entreprises (pub, vêtements…).

L’avenir du secteur musical ?

Cette indépendance des artistes vis-à-vis des labels est donc un mouvement de fond dans l’économie musicale actuelle, qui n’est pas près de ralentir, mais que l’on peut relativiser tout de même. En effet, selon l’étude Midia Research citée au début de cet article, en dépit de la croissance exceptionnelle des revenus générés par les artistes non-signés, ceux-ci ne représentaient en 2018 que 2,7% de ces revenus, toujours au niveau mondial. C’est donc une nouveauté du paysage musical dont il faut tenir compte, d’autant plus qu’elle est en pleine expansion, mais qui ne remet pas en cause la totalité de l’écosystème. Les labels sont loin d’être morts et enterrés.

Sources : étude Midia Research

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